Écrit par Fanny Pascual
L’entretien des vêtements a été grandement facilité et accéléré depuis l’avènement des fibres synthétiques. En effet, le nylon, le polyester et l’acrylique sont des matériaux que l’on peut lancer impunément dans la laveuse ou la sécheuse, peu importe la température, dans un geste rapide, insouciant, voire non intentionnel, et en ressortir presque intacts. Ces vêtements synthétiques s’adaptent bien à une vie effrénée, marquée par une certaine indifférence aux objets qui nous entourent.
Les vêtements en laine sont différents à cet égard. Cette fibre, provenant de la toison du mouton, est une matière issue du vivant. Provenant d’une protéine animale ingénieusement conçue pour remplir des fonctions physiologiques vitales chez l’animal, la fibre de laine réagit à ce à quoi on l’expose… à son environnement. Elle requiert donc un soin et un entretien particuliers, en écho aux bienfaits que ces lainages procurent à notre peau.
Un antibactérien naturel
La laine possède une propriété naturellement antibactérienne. Voilà pourquoi il n’est pas nécessaire de laver complètement votre lainage après chaque usage, contrairement aux vêtements synthétiques qui ont la fâcheuse tendance à retenir les odeurs corporelles. Une simple aération, en étendant le linge à plat ou sur une corde à linge, suffit parfois à éliminer l’humidité et les bactéries présentes dans le vêtement.
Le froid
Cette propriété est également mise à profit dans une méthode traditionnelle et surprenante : le lavage des lainages dans la neige. Certains auront entendu parler de cette technique consistant à déposer tapis, couvertures et vêtements de laine à l’extérieur en hiver, ensevelis sous de la neige poudreuse pendant 30 à 60 minutes. Le froid et l’humidité de la neige permettent de rafraîchir la fibre, en éliminant les odeurs et les impuretés accumulées, sans l’endommager.
La chaleur
À l’opposé, la chaleur est un ennemi redoutable pour l’entretien des lainages. Lorsque exposée à l’eau chaude, la fibre de laine se détend et, à l’échelle microscopique, ses écailles se déploient, transformant chaque filament en un véritable velcro. Ajoutez-y de l’agitation et du frottement, comme ceux produits par une machine à laver, et vous obtiendrez une réaction physique irréversible : le feutrage. Voilà comment votre pull en cachemire se retrouve rétréci et rigide, les fibres ayant adhéré les unes aux autres de manière définitive.
Cette réaction peut parfois être souhaitée, notamment dans certains procédés manufacturiers de fabrication comme la laine bouillie ou le foulage, qui visent un fini plus dense et solide. Pour éviter ce genre de catastrophe, on choisit toujours l’eau froide et un cycle délicat avec peu d’agitation en machine. Pour une sécurité maximale, on privilégiera le lavage à la main, à l’eau froide, avec un simple trempage. Le séchage doit se faire exclusivement à l’air libre, idéalement à plat. De grâce, oubliez votre sécheuse pour les lainages ! Les quelques minutes qu’elle vous fera gagner seront vite regrettées quand votre pull préféré sera irrémédiablement feutré.
Si le vêtement de laine est imbibé d’eau et difficile à étendre, commencez par le placer entre deux serviettes que vous roulerez pour en extraire un maximum d’eau, sans le tordre. Cette technique est sécuritaire pour le vêtement, contrairement à l’essorage à la main, qui pourrait le déformer.
Les mites
Même après avoir adopté de bonnes habitudes pour laver vos vêtements de laine, un ennemi redoutable demeure : la mite, ce petit insecte volant impitoyable envers les lainages. Nous nous souvenons peut-être de membres de notre famille qui conservaient leurs vêtements dans des placards en cèdre, accompagnés de boules à mites. Ces placards de cèdre sont aujourd’hui plutôt rares, la plupart des vêtements étant désormais en fibres synthétiques. Mais attention, la mite sait faire la différence entre un pull en acrylique et un cardigan en laine d’agneau. Ses larves microscopiques se nourrissent exclusivement de fibres animales (alpaga, mouton, mohair, cachemire, etc.) et raffolent des coins sombres de votre penderie.
Après leur passage, les mites laissent des trous dans les vêtements de laine, et il est très difficile de se débarrasser complètement d'une infestation. D’une certaine manière, cela témoigne du caractère biodégradable de la laine, un matériau pleinement intégré dans le cycle de la vie, sans impact négatif sur l’environnement. Mais encore faut-il vouloir que notre chandail soit rendu à cette étape de son cycle de vie !
Si vous souhaitez éloigner les mites sans utiliser de boules à mites aux odeurs chimiques fortes ou si vous n’avez pas de placard en cèdre, il est facile de se procurer en quincaillerie des pièges collants à phéromones, qui attirent les mites mâles et empêchent ainsi leur reproduction.
Si vous soupçonnez qu’un vêtement est infesté, vous pouvez le congeler pendant quelques jours (dans un sac, au congélateur ou à l’extérieur si la température descend sous les -10 °C), ou encore le mettre au four à 120 °F. Ces deux méthodes permettent de tuer les œufs invisibles à l’œil nu.
Le reprisage
Depuis quelques années, un mouvement se popularise autour du reprisage ou raccommodage des textiles, comme geste de revalorisation et même de personnalisation des vêtements endommagés. Jadis, une activité courante et nécessaire des couturières et mères de famille, le reprisage avait disparu avec l’ère de l’hyperconsommation, où un vêtement abîmé était rapidement jeté et remplacé par du neuf.
Aujourd’hui, cette pratique revient à la mode, rappelant l’importance de prendre soin des objets que nous aimons, de prolonger leur durée de vie, et d’y ajouter une touche personnelle. Ce geste simple, durable et créatif évoque les techniques ancestrales japonaises du boro et du sashiko : de véritables arts textiles de reprise et de couture esthétique, visant à transformer les vêtements usés en étoffes nouvelles, prisées aujourd’hui pour leur style et leur complexité.
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Le soin et l’entretien que nous apportons aux choses que nous aimons reflètent la valeur que nous leur accordons. Oui, la laine demande un peu plus d’attention que certaines fibres synthétiques, mais cette attention est minime au regard des bienfaits qu’un vêtement en fibre naturelle procure à celui qui le porte, de son faible impact écologique, et de la conscience que nous développons envers les objets que nous choisissons pour nous entourer.